Proposition d’un post-doctorat sur la mesure du non-recours aux prestations sociales

La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) et l’université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC), en collaboration étroite avec la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), proposent un post-doctorat d’une durée de deux ans. Ce projet de recherche bénéficie d’un financement assuré par la délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté (DIPLP), chef de file de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté.
Nous recherchons un candidat titulaire d’un doctorat depuis moins de cinq ans, avec de solides compétences en statistiques et méthodes quantitatives. Ce candidat devra maîtriser le langage de programmation SAS. Des connaissances sur les thèmes de la protection sociale, du non-recours, sur la législation sociofiscale, sur les méthodes de microsimulation seraient un plus.

Thématique de recherche proposée


L’enjeu de cette recherche est d’aboutir à une méthode fiable de mesure régulière du non-recours aux prestations sociales.
Le non-recours aux prestations sociales
Actuellement, des personnes sont « éligibles » à des prestations sociales, par exemple au revenu de solidarité active (RSA), dans la mesure où elles réunissent toutes les conditions de droit (conditions de résidence, d’âge, de revenus…), et pourtant elles ne sont pas « bénéficiaires » de ces prestations. Les raisons du non-recours aux prestations sociales peuvent être variées : manque d’information sur ces prestations ou sur les organismes auxquels s’adresser, réticence ou découragement face à la complexité des démarches administratives à mettre en œuvre pour pouvoir en bénéficier, crainte des contrôles administratifs, refus de dépendre de l’aide sociale… Les situations de non-recours peuvent par ailleurs concerner des périodes plus ou moins longues.
Les enjeux d’une mesure régulière du non-recours aux prestations sociales
Le non-recours constitue une « faille » dans le système de protection sociale : les politiques mises en place pour protéger les citoyens les plus vulnérables échouent en partie s’il existe des freins à l’accès aux droits. Pouvoir mesurer régulièrement le non-recours aux prestations sociales, c’est permettre d’éclairer l’action publique sur l’ampleur du problème, les priorités d’action, les progrès réalisés… Or, il n’existe actuellement aucune mesure fiable et régulière du non-recours ; seules des informations partielles ou ponctuelles existent (par exemple celles issues d’une enquête menée par la DARES en 2010-2011 sur le RSA ).
Le nouveau « moyen terme » 2019-2023 du Conseil national de l’information statistique (CNIS) consacre ainsi un avis spécifique à la question de la mesure du non-recours aux droits sociaux, encourageant la poursuite des travaux réalisés pour mieux repérer et caractériser les situations de non recours. C’est également l’objet de la réunion de la commission thématique « Services publics et services aux publics » du CNIS du 22 mars 2019.

La DREES signera une convention de recherche avec l’université Paris-Est Créteil Val de Marne, laquelle proposera un contrat à durée déterminée au chercheur qui sera rattaché à l’Érudite, le laboratoire d’économie de l’université. Le lieu principal de travail est la DREES, 10, place des cinq martyrs du lycée Buffon, Paris 14ème. Une partie du travail aura lieu également à la CNAF, 32, avenue de la Sibelle, Paris 14ème.

Au-delà de l’encadrement technique au quotidien, assuré par la DREES et la CNAF, un comité de suivi du projet sera organisé, auquel participeront l’UPEC, la DREES, la CNAF et l’INSEE. La date de prise de poste prévue est septembre 2019.
Les candidatures (CV et lettre de motivation) devront être adressées à :
Emmanuelle Nauze-Fichet, responsable du projet pour la DREES
(emmanuelle.nauze-fichet@sante.gouv.fr)
François Legendre, responsable scientifique du projet pour l’UPEC et tuteur universitaire des deux post-doctorants (F.Legendre@u-pec.fr),
– avec copie à Florence Thibault, responsable du projet pour la CNAF
(florence.thibault@cnaf.fr).

Méthodologie

La méthode envisagée ici consiste à confronter la population bénéficiaire, appréhendée à partir des données administratives des organismes prestataires, à la population éligible, appréhendée à partir du modèle de microsimulation Ines . Ce modèle, cogéré par l’INSEE, la DREES et la CNAF, permet de simuler les effets de la législation sociale et fiscale pour un échantillon représentatif des ménages résidant en logement « ordinaire » , en France métropolitaine. Il s’appuie sur les données de l’enquête revenus fiscaux et sociaux de l’INSEE (ERFS), qui rassemble des informations issues de diverses sources pour plus de 50 000 ménages.
La méthode envisagée, bien qu’applicable sur le plan pratique, cumule plusieurs sources d’imprécision qui conduisent, sans diagnostic complet de qualité, à ne pas diffuser actuellement de taux de recours. L’objet des travaux est donc d’établir ce diagnostic, de faire le point sur ce qui est plus ou moins robuste, de proposer des améliorations pour ce qui est considéré comme fragile. Il s’agit d’identifier les différentes sources d’imprécision et, pour chacune, de définir la bonne approche statistique pour réaliser un diagnostic de qualité, puis de proposer des pistes pour améliorer la qualité (via par exemple un enrichissement des données, une amélioration des méthodes d’imputation, de calage, de simulation…). Ces travaux supposent d’entrer finement dans les mécanismes de calcul des droits aux prestations, dans les différentes sources de données, dans les programmes de simulation. Le chercheur pourra être amené à manipuler des sources auxiliaires, données d’enquête ou données administratives, voire mettre en place une ou plusieurs enquêtes


Organisation du travail


Deux candidats seront retenus sur la base de cette proposition. Ils travailleront ensemble sur ce projet, se partageant les explorations et les enseignements qu’elles apportent.
Au quotidien, ils seront encadrés techniquement par les équipes Ines de la DREES et de la CNAF, selon les phases du projet. Ils seront localisés à la DREES, mais pourront être amenés à travailler assez régulièrement à la CNAF, notamment pour les travaux nécessitant l’accès à certaines bases de données individuelles.
Un groupe de suivi plus large du projet sera mis en place (réunissant notamment le tuteur universitaire et l’INSEE). Il se réunira aux grandes étapes du travail pour partager régulièrement l’information sur l’avancée des travaux et discuter des pistes de poursuite. Les partenaires pourront également contribuer par leurs propres travaux à l’avancée collective du projet.
Par ailleurs, des points d’étape seront également organisés avec la DIPLP, financeur de ce projet de recherche, pour échanger avec eux sur l’avancée des travaux.
Publications
Ce projet devrait aboutir sur un rapport de recherche. Des articles dans divers supports de publication sont envisageables (collections des organismes partenaires, revues de recherche externes…).


Quelques références bibliographiques


1/ Le grand rapport français le plus récent.
Rapport d’information du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale sur l’évaluation des politiques publiques en faveur de l’accès aux droits sociaux, octobre 2016. http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rap-info/i4158.pdf
2/ Le grand rapport international le plus récent.
Eurofound, « Access to social benefits: Reducing non-take-up », septembre 2015.
https://www.eurofound.europa.eu/publications/report/2015/social-policies/access-to-socialbenefits-reducing-non-take-up
3/ Quelques articles / dossiers de référence.
Warin P., « Le non-recours : définitions et typologies », Working Paper n° 1, Odenore, version actualisée, décembre 2016. https://odenore.msh-alpes.fr/documents/wp1.pdf
Cnaf, « Gérer les droits sociaux », Informations sociales n° 178, juillet-août 2013. https://www.cairn.info/revue-informations-sociales-2013-4.htm?contenu=sommaire
Hamel M.-H., « Fraude, indus, non-recours : comment faciliter le juste paiement des prestations sociales ? », La note d’analyse n°306, Centre d’analyse stratégique, novembre 2012. http://archives.strategie.gouv.fr/cas/system/files/2012-11-27-paiementbondroit-na306.pdf
Domingo P. et Pucci M., 2012, « Les non-recourants au RSA », », L’e-essentiel n° 124, Cnaf, juillet 2012.
https://www.caf.fr/sites/default/files/cnaf/Documents/Dser/essentiel/124_essentiel_-_nonrecours_rsa.pdf